L’explication scientifique des conduites humaines est-elle compatible avec l’affirmation de la liberté?

 

  « Admettre une âme pour expliquer les phénomènes c’est être réduit à l’ opération du Saint-Esprit »   La Mettrie,  L’homme machine( 1747)
     » Je parlerai souvent de la doctrine reçue que je viens de résumer* comme du « dogme du fantôme dans la machine »
    » Les hommes ne sont pas des machines pas même des machines dominées par l’esprit »,   Gilbert Ryle, La notion d’esprit ( 1949)
    (*: le dualisme de Descartes considérant que l’âme ele corps sont deux substances distinctes)
                                                      
Exemple de dissertation possible entièrement  rédigée
    
La liberté, c’est d’abord pouvoir faire ce qu’on a choisi de faire alors qu’on aurait pu choisir autre chose. La liberté s’oppose à l’idée d’une détermination autre que notre propre volonté, qui est la faculté de « poursuivre ou fuir ce que l’entendement propose », donc de se déterminer, de commencer une série contingente de détermination, non d’en poursuivre une. Or le principe même de l’explication scientifique , c’est de ramener à une cause, en partant du principe que rien n’arrive sans une cause (qui a elle-même une cause) et que tout phénomène obéit à une loi. Donc expliquer une conduite humaine, c’est dire qu’elle est la cause de cette action, inscrire cette action dans une série telle que finalement cette conduite s’avère nécessaire, elle n’aurait pas pu être autre, ce qui revient à dire que le choix n’était qu’une illusion. Il y a donc, semble-t-il, incompatibilité entre explication scientifique et liberté. Mais la liberté peut aussi être pensée comme le pouvoir d’être maître de ses choix. Être maître ne signifie pas nécessairement qu’on aurait pu vouloir autrement, mais que c’est nous qui décidons véritablement, ce qui exclut la réaction instinctive, impulsive, le caprice mais pas une loi que nous nous donnerions à nous-même, une rationalité dans le choix.. L’explication scientifique des conduites humaines pourrait donc être l’explicitation de cette loi ou de cette rationalité, compatible avec la liberté. Aussi on peut se demander si l’explication scientifique des conduites humaines est vraiment incompatible avec l’affirmation de la liberté. C’est donc du problème du rapport entre déterminisme et liberté dont nous allons traiter. Ce sujet présuppose que l’on peut expliquer les conduites humaines comme on explique un phénomène naturel. Nous nous demanderons donc si ramener les conduites humaines au principe de causalité ce n’est pas nier la liberté de l’homme, si la liberté et déterminisme ne peuvent pas être compatibles et si cette compatibilité n’est pas ce qui oblige la science à aborder différemment phénomène humain et phénomène naturel.

     Expliquer, c’est déplier, analyser. Le mode d’explication scientifique est d’expliquer le particulier par le général, sous des lois. Donc le scientifique cherche une uniformité dans les phénomènes et cela par « l’usage combiné du raisonnement et de l’observation ». Pour que quelque chose soit expliqué scientifiquement, il faut que cette chose puisse être subordonnée à des lois, et donc qu’il y ait déterminisme, c’est-à-dire que la chose ait une cause dont elle est la conséquence et que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Ce principe d’explication semble donc incompatible avec l’idée de liberté de choix, pensée sur le modèle du libre-arbitre. Comme le dit Descartes, le libre-arbitre, c’est le pouvoir de se déterminer de manière contingente. C’est-à-dire que face à l’alternative A ou B, j’ai la possibilité de choisir A comme celle de choisir B et si je me détermine pour A, c’est parce que je l’ai voulu et cela ne dépend que de ma volonté. Or si on explique scientifiquement ce choix ce sera pour lui trouver une cause ou une cause à la raison de choisir A que l’on s’est donnée, dans ce cas on niera la contingence du choix. On montrera en effet que le choix de A était nécessaire. On pourra même dégager des lois: dans telle situation l’homme fait ou choisit ceci ou cela, ce qui remettrait aussi en question l’idée d’une liberté individuelle. Nous ne sommes pas différents dans nos choix, nous participons de la même nature humaine, donc nos choix ne sont pas contingents mais nécessaires.  
  De plus une explication scientifique des conduites humaines pourrait ramener ce que l’on croit relevé du choix de l’esprit conscient à un simple mouvement du corps, d’où une illusion de liberté. Je crois choisir celui que j’aime, je crois choisir de protéger mon enfant, mais ce n’est qu’un mécanisme hormonal; je crois choisir ce que je trouve beau mais ce n’est qu’une disposition de mon cerveau, je crois parler librement lors d’une psychanalyse alors qu’il y aurait un déterminisme psychique inconscient, selon Freud, à l’origine de mes associations d’idées ou du choix des thèmes abordés. La vie psychologique ne serait que l’effet de la vie physique; empirique, que l’on pourrait expliquer en remontant aux causes matérielles, physiologiques ou sociales, historiques. L’esprit et le corps ne sont pas 2 substances séparées, mais 2 points de vue épistémologiques différents; la volonté n’est que la prise de conscience, d’une « tension musculaire » comme le suggère Russell dans Science et religion, donc le versant psychologique d’un mouvement physique.
   L’explication scientifique des conduites humaines pourrait même réduire la liberté des hommes, si elle existait encore malgré tout, car sachant que l’homme obéit à telle loi du comportement, réagi à tel ou tel motif, on pourrait faire de lui ce que l’on veut et sans qu’il s’en rende compte, bercé par l’illusion de la liberté. Comme le dit Spinoza, en comparant l’homme à une pierre en train de chuter, l’homme se croit libre par ce qu’il est conscient de poursuivre telle ou telle fin mais ignorant des causes qui le déterminent à les poursuivre. Il suffit de le déterminer à poursuivre telle fin sans qu’il se rende compte de la manipulation et la liberté s’envole.
   Cependant, il serait curieux qu’ici la science quand elle traite du phénomène humain soit malveillante et liberticide, alors que le but de la science de la nature a été, en plus de la connaissance, de donner à l’homme les moyens de prévoir, d’agir sur la nature et par là de devenir selon la formule de Descartes, « comme maître et possesseur de la nature », donc de se libérer de certaines contraintes. Aussi on peut se demander si l’explication scientifique des conduites humaines, même si elle remet en question la contingence des choix, si elle ramène notre existence intelligible à notre existence empirique, est vraiment incompatible avec une liberté. Ne peut-on concilier déterminisme et liberté?

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Comme on vient de le dire le déterminisme n’est pas le fatalisme. Si le fatalisme pose une nécessité inconditionnelle, pas de si… et fait qu’on ne peut avoir aucune emprise sur le destin, obéissant à une loi extra-mécanique ( la volonté divine), le déterminisme pose lui une nécessité conditionnelle: si… alors; ce qui permet comme nous l’avons dit la prévision et par là l’action. On peut éviter à la cause de se mettre en place, on peut introduire un élément modifiant l’effet ou impliquant une autre loi. Dans ce cas, on peut penser que si l’individu a compris comme il fonctionne, il peut « jouer le rôle que naguère , au moyen de son caractère en empirique, il ne faisait que naturaliser, avec art et méthode, fermeté et convenance, sans jamais se départir de son caractère », comme le dit Schopenhauer dans son Essai sur le libre-arbitre ( p 91). Savoir qui on est, comment on fonctionne, les motifs qui nous font réagir on non, c’est être capable d’échapper à certaines manipulations, c’est être aussi capables de connaître avec l’expérience nos limites et celles des autres. On peut ainsi préserver certaines de nos libertés. On ne va pas prêter de l’argent à celui que l’on sait incapable de résister à la dépense; on ne va se mettre dans certaines situations que l’on sait nuisibles pour soi. Car si pour Schopenhauer, on ne change pas de caractères et par là de but, on peut par la connaissance se donner d’autres moyens pour les atteindre, en mettant en place d’autres motifs jusque là inconnus qui peuvent influencer le choix. Pour Schopenhauer , les termes du choix ne sont plus alors exactement les mêmes , d’autres motifs entrant en jeu, même si selon lui, on ne changera pas par là celui que l’on est . Ceci ne serait selon lui « pas plus chimérique que de changer le plomb en or en le soumettant à une influence extérieure, ou d’amener un chêne par une culture très soignée à produire des abricots ».
    Le but de l’explication scientifique n’est pas de retirer la liberté aux hommes, mais de les libérer de certaines illusions et par là de certaines souffrances. C’est par exemple le cas de l’hypothèse de Freud de l’inconscient dont le but n’est pas de se retrancher derrière un alibi de l’inconscience, mais de comprendre les causes inconscientes de nos choix et actes, pour pouvoir par un travail de prise de conscience, s’en libérer et par là devenir maître de soi. De même le but de la connaissance historique, s’efforçant de répondre aux critères de scientificité est de se libérer du passé et de pouvoir prendre en main son histoire. En connaissant le fonctionnement des manipulateurs et nos propres mécanismes, on peut déjouer leur stratégie.
   Enfin, on peut penser qu’être libre, ce n’est pas avoir nécessairement la possibilité de se changer mais plutôt d’être en accord avec soi-même. Ne pas subir ce que l’on est ou se contenter de réagir mais agir, voilà ce qu’est la liberté. En effet, on peut penser que la liberté ne s’oppose pas à la nécessité mais à la contrainte. Et c’est d’ailleurs cette absence de contrainte qui donne un sentiment de liberté, et qui est sans doute la liberté. Car si nos choix n’ont pas de causes, on ne peut choisir sans mobile, sans raison . Et le fait que l’on prenne telle raison plutôt qu’une autre, a sans aucun doute une cause. Difficile de soutenir en effet le libre arbitre. Mais au fond, l’essentiel n’est pas que nos choix n’ait pas de cause, mais plutôt de pouvoir nous reconnaître dans ses causes, ou faire en sorte que ces causes nous soient le moins étrangères possibles, puisque de toute façon il y en aura une. Subir sa nature par ignorance, c’est ne pas être libre. Savoir qui on est et faire des choix en accord avec sa nature, voilà ce que pourrait être la liberté. Et dans ce cas le déterminisme ne s’oppose pas à la liberté, mais peut être compatible avec elle. C’est ce que soutient Spinoza, dans sa lettre à Schuller en disant que « est libre celui qui existe et agit par la seule nécessité de sa nature, et contrainte cette chose qui est déterminée par une autre à exister et à agir selon une modalité précise et déterminée. […] Vous voyez donc que je ne situe pas la liberté dans un libre décret, mais dans une libre nécessité. » Dans ce cas, l’explication scientifique des conduites humaines n’est pas incompatible avec la liberté, elle permet même de se libérer et d’échapper à l’hétéronomie. Au lieu de se perdre dans des désirs périphériques, mimétiques, ignorants de soi et des objets, on peut en se connaissant, en sachant comme nous fonctionnons , quelle est notre loi, tendre vers ce qui nous est utile, faire d’une cause subie, une raison d’agir. Bergson va dans le même sens ce qui s’oppose à la liberté, ce n’est pas ma nature, mon essence et ses déterminismes, c’est le « courant social » qui nous détermine et nous éloigne de ce que nous sommes.
   Mais ne peut-on pas dire, par delà la cohabitation possible du déterminisme et de la liberté, que ce qui rend compatible la liberté et l’explication scientifique des conduites humaines, c’est qu’on explique pas scientifiquement de la même manière le phénomène humain et le phénomène naturel, de même qu’on ne pas par prévoir de la même manière un phénomène naturel et un phénomène humain?

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En effet, réduire la nature à des lois et un déterminisme peut déjà poser problème , comme le soutient Russell avec la physique quantique qui doit se contenter de probabilités, comme le montre Popper avec sa théorie du falsificationnisme selon laquelle on ne peut prouver une loi, ne pouvant faire toute l’expérience possible, le principe du déterminisme pourrait même n’être qu’une projection du Ciel sur la Terre, selon Bachelard, alors que « le phénomène terrestre a une diversité et une mobilité immédiates trop manifestes pour qu’on puisse y trouver sans une préparation psychologique,une doctrine de l’Objectif et du déterminisme ». ( texte 1 p238) .
    Mais réduire le comportement humain à des lois posent encore plus problème. Et c’est ce que montre la difficulté de prévoir les comportements humains. Comme le note Montesquieu dans L’esprit des lois où il s’efforce de penser la nature des peuples et des États selon le climat, le territoire, etc.. donc à la manière d’un scientifique : « il s’en faut de beaucoup que le monde intelligent (le monde de l’homme) soit aussi bien gouverné que le monde physique. Car, quoique que celui-là ait aussi des lois qui par leur nature soient invariables, il ne les suit pas constamment comme le monde physique suit les siennes. » L’homme bien qu’obéissant à des lois resterait en partie imprévisible. Pourquoi? l’homme ne suit pas constamment les lois?
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      On peut certes expliquer cette difficulté de prévision par la complexité de l’être humain, par le fait que chaque individu est unique, comme chaque situation. Chaque acte reste unique malgré une uniformité possible. On peut aussi expliquer cela par les limites de nos connaissances: le fonctionnement du cerveau est loin d’être intégralement connu, il est difficile d’appliquer la méthode scientifique sur le comportement humain. En histoire par exemple, chaque événement n’a lieu qu’une seule et unique fois. On parle de primultimité qui empêche toute expérimentation, mais aussi d’expliquer le particulier par le général. On peut aussi expliquer cela par une capacité à l’a-rationalité, c’est-à-dire que l’homme serait capable de transgresser volontairement ce que l’on pourrait attendre de lui au nom de la rationalité ou au contraire par un effet de la connaissance, qui est de permettre de mieux choisir et par là de déjouer la prévision. Mais on peut aussi expliquer cela par une part de liberté. Si l’homme reste imprévisible, même si on peut dégager des régularités dans son comportement, des traits de caractère, c’est parce qu’en dernière instance, c’est lui qui choisit et qu’il peut à tout moment opposer à la loi naturelle, à sa tendance naturelle, une loi de la raison. Il peut opposer à la nécessité, l’obligation.
C’est ce qui fait selon Kant que même si on trouve des causes à nos choix et actes, on peut malgré tout ressentir de la culpabilité parce qu’on sait que nous ne nous réduisons pas à notre existence concrète, empirique, mais qu’en tant qu’être de raison , nous avons aussi une existence intelligible , nous sommes capables d’écouter notre raison, plutôt que les circonstances ou nos penchants. ( texte 1 p 420). C’est ce qui fait selon Sartre que l’on se retranche derrière le déterminisme pour fuir l’angoisse de la liberté et de la responsabilité qui en découle.

   Nous avons donc vu que l’explication des conduites humaines présupposant un déterminisme semblait incompatible avec la liberté qui présupposa, elle, contingence. Mais nous nous sommes rendu compte que le déterminisme pouvait être une ressource pour la liberté et que la liberté était plutôt l’absence de contrainte que de déterminisme. Enfin nous avons noté que les conduites humaines ne pouvaient être expliquées comme des phénomènes naturels, ce qui fait d’ailleurs la particularité des sciences humaines et qui en fait un objet de débat, qu’il y avait une part d’imprévisibilité qui pouvait être associée à une part de liberté en l’homme. Donc l’explication scientifique des conduites humaines n’est pas incompatible avec l’affirmation d’une liberté, et ses limites prouvent même une liberté irréductible.

Texte : Durkheim, L’Education morale

Texte : Durkheim, L’Education morale

Le sujet :
Expliquez le texte suivant :
La morale de notre temps est fixée dans ses lignes essentielles, au moment où nous naissons ; les changements qu’elle subit au cours d’une existence individuelle, ceux, par conséquent, auxquels chacun de nous peut participer sont infiniment restreints. Car les grandes transformations morales supposent toujours beaucoup de temps. De plus, nous ne sommes qu’une des innombrables unités qui y collaborent. Notre apport personnel n’est donc jamais qu’un facteur infime de la résultante complexe dans laquelle il disparaît anonyme. Ainsi, on ne peut pas ne pas reconnaître que, si la règle morale est œuvre collective, nous la recevons beaucoup plus que nous ne la faisons. Notre attitude est beaucoup plus passive qu’active. Nous sommes agis plus que nous n’agissons. Or, cette passivité est en contradiction avec une tendance actuelle, et qui devient tous les jours plus forte, de la conscience morale. En effet, un des axiomes fondamentaux de notre morale, on pourrait même dire l’axiome fondamental, c’est que la personne humaine est la chose sainte par excellence ; c’est qu’elle a droit au respect que le croyant de toutes les religions réserve à son dieu; et c’est ce que nous exprimons nous-mêmes, quand nous faisons de l’idée d’humanité la fin et la raison d’être de la patrie. En vertu de ce principe, toute espèce d’empiètement sur notre for intérieur nous apparaît comme immorale, puisque c’est une violence faite à notre autonomie personnelle. Tout le monde, aujourd’hui, reconnaît, au moins en théorie, que jamais, en aucun cas, une manière déterminée de penser ne doit nous être imposée obligatoirement, fût-ce au nom d’une autorité morale.
DURKHEIM, L’éducation morale
Le corrigé
Les difficultés / pièges à éviter :
Il fallait faire attention à ne pas « plaquer » des connaissances sur Durkheim (issues du programme de SES spécialité) sans rapport avec le texte.
La difficulté de toute explication est justement de ne pas faire de contresens ou de paraphrase. Il fallait réfléchir à la portée du texte : pourquoi Durkheim souligne-t-il la contradiction entre la dimension collective de la morale et les valeurs humanistes ?
Attention, ici Durkheim ici ne dénonce pas la valeur de l’autonomie. Au contraire il pense que c’est la seule valeur aujourd’hui susceptible de fédérer les hommes.
Les notions au programme : La morale,   la liberté.
Le thème du texte : l’autonomie.
Problème traité par le texte : A quelle difficulté s’oppose aujourd’hui la transmission des valeurs morales
Thèse de l’auteur : la transmission des valeurs morales est confrontée à un dilemme : concilier le caractère contraignant des règles collectives de la morale avec la valeur de l’autonomie.
Les références pertinentes : Ici Durkheim évoque la conception kantienne de la morale.
Le plan proposé :
Première partie : ligne 1 à 10, la morale est un ensemble de règles qui s’imposent de l’extérieur aux individus.
1/ Les hommes n’ont pas d’action individuelle dans l’élaboration de la morale. Ils n’en sont pas les auteurs. La morale est un processus collectif, qui évolue très lentement.
2/ C’est donc la pression sociale qui provoque le comportement moral de l’homme. La morale est ainsi un facteur de cohésion sociale.
Seconde partie : ligne 10 à 21 : la contradiction entre la dimension collective de la morale et l’aspiration à l’autonomie entre les hommes ?
1/ La valeur de la personne humaine :
La morale actuelle repose sur la dignité de la personne humaine (référence Kant). Par conséquent, c’est l’autonomie qui est une valeur centrale.
Y a-t-il un risque de dissolution de toute morale, chacun désirant être l’auteur de ses propres règles morales ? Ce refus des règles extérieures va-t-il conduire au relativisme ?
2/ Une valeur collective.
« Tout le monde » pense que l’autonomie est plus importante que la conformité à des règles extérieures à l’individu. Le respect de la personne humaine fait l’objet d’un « culte », ce qui implique une communion collective. Il y a ainsi un renversement : la valeur de l’autonomie est une valeur individuelle, mais elle est partagée par tous.
Par conséquent, le respect de la personne humaine est la seule valeur susceptible de fédérer les hommes. La morale ne peut plus être enseignée sans faire appel à l’autonomie.

Faut-il oublier le passé pour se donner un avenir ?

Faut-il oublier le passé pour se donner un avenir ?

Le sujet : Faut-il oublier le passé pour se donner un avenir ?
Le corrigé :
Ce sujet interroge sur le rapport passé, présent, futur, suggérant que le passé est un poids et que l’action historique et individuelle doit s’en libérer pour être ! Tout cela avec un œil favorable pour le futur, promesse de nouveauté, d’inconnu, et donc livré à tous les imaginaires, par opposition au passé trop commun et rabâché. Pourtant, négliger le passé peut être un danger et peut-être que l’obstacle est plutôt le présent et ce qu’il peut être.
Auteurs en référence : Nietzsche, Aron, Sartre (liberté, projet)
Plan proposé :

I. Dans le passé, pas d’avenir
II. Sans conscience du passé, pas d’avenir
III. Autres conditions : avoir un futur est différent d’avoir un avenir

I. Dans le passé, pas d’avenir
Oublier = ignorer, ne pas tenir compte, laisser tomber…
1. Ne peut apparaître que le passé soit une contrainte pour faire le futur : on peut ici penser à la critique nietzschéenne.
Dans la seconde considération intempestive de l’excès de conscience historique qui a pour conséquences :
  • le passéisme -> la « manie de l’antiquaille » -> incapacité à se tourner vers l’avenir, qui est disqualifié par avance
  • l’esprit de vengeance -> on est incapable de voir le présent détaché du passé, on y rejoue le passé d’où répétition, piétinement, absence de progrès
  • on avance dans le présent à la manière d’un « chien limier », on cherche des traces, incapable de saisir le neuf, d’envisager d’autres possibles.
2. Inutilité des leçons de l’histoire : chaque événement est une seule et unique fois, avec changement de contexte, d’acteurs, etc. Ne pas avoir la mémoire de son passé, c’est le subir, comme celui qui souffre d’un passé caché, non su.
Transition : Négliger le passé peut apparaître comme quelque chose de nécessaire, mais est-ce pour autant légitime et raisonnable de n’avoir aucune connaissance du passé ? Peut-on le nier ?
II. Sans conscience du passé, pas d’avenir
1. On peut bien sûr penser au devoir de mémoire comme un hommage, une dette envers le passé qui permet de restituer ainsi une continuité dans le temps, une filiation, transmettre un héritage. Se libérer totalement du passé pourrait être prendre le risque de se perdre en perdant ses racines, ce qui nous constitue et permet ensuite de s’orienter.
2. La conscience du passé permet justement de s’en libérer, en faire le deuil : effet cathartique de la conscience historique. « La conscience du passé est constituée de l’existence historique » (R. Aron). D’où le drame de l’amnésique, qui a un passé ignoré mais qui le détermine malgré tout et contre lequel il ne peut rien.
3. La connaissance du passé permet de libérer présent et avenir en ayant une compréhension du présent (conséquences du passé), une vue des mécanismes de l’histoire et des éléments sur la nature humaine qui permettent d’éclairer l’action.
Bergson distingue le rêveur (sans mémoire), l’impulsif (sans mémoire) et l’homme d’action qui sait convoquer le passé, les souvenirs utiles pour agir.
Oublier, c’est aussi pardonner, ne pas être dans le ressentiment, et pour cela, il faut savoir ce qu’on pardonne. Pardonner n’est pas perdre la mémoire, mais en avoir une, considérer le passé comme passé.
Transition : Donc ce qui est nécessaire, ce n’est pas d’oublier le passé mais d’en avoir mémoire et connaissance de manière pertinente en évitant les excès. Mais cela suffit-il pour se donner un avenir ?
III. Autres conditions : avoir un futur est différent d’avoir un avenir
1. La liberté d’action dans l’histoire : ne pas être forcément seul auteur mais en tout cas acteur.
2. Assumer ses responsabilités en tant que sujet de l’histoire et de sa propre vie, ne pas se cacher derrière fatalisme et déterminisme ou derrière l’idée que nous ne sommes pas seuls à la faire.
3. Avoir un projet aussi bien individuel que collectif, ne pas se contenter de ce qui est, de l’immédiat.
4. Garder une certaine foi en l’avenir : après une idéologie du progrès, on sombre parfois dans un pessimisme d’humeur et la crainte des utopies.

Une chanson de Theo Hakola

Une chanson de Theo Hakola

Ô tendre jeunesse !

Ô tendre jeunesse, chose douce, chose fluide
Dites non à la vieillesse, Écoutez vos appétits
Ô tendre jeunesse, chose molle, chose humide
Dites non à la sagesse car un bon look n ‘a pas de prix

Laissez-nous vous vendre nos t-shirts pourris
Laissez-nous vous prendre pour de gros abrutis
qui font pour nous de la réclame en portant nos produits
qui nous paient pour faire la publicité qui nous a tant réussi

N’importe quelle crotte qui porte la marque, qui porte la marque qui brille
Achetez-la ô tendre jeunesse, faites monter nos profits
Faites-vous respecter ainsi par d’autres abrutis
Dépensez, ô tendre jeunesse, dépensez toutes vos vies

Que la marque rayonne de haut en bas, que personne ne soit à l’abri
des baskets et des casquettes ornés de la marque qui brille
Ne soyez pas trop regardants à l’égard de vos économies
Ô tendre jeunesse, remplissez nos caisses, faites multiplier nos fruits

Ô tendres chiens qui attachez si bien vos chaînes vous-mêmes :
Léchez, lavez, repassez, rapportez et portez vos laisses
Soyez complices avec la police de vos propres supplices
N’affichez pas vos faiblesses, ne vous écrasez pas comme des gonzesses
Ne vous habillez pas avec petitesse, ô chère et tendre et jobarde jeunesse
Apportez-nous toute votre largesse et oui, faites fructifier notre business !

Ô tendre jeunesse, ô idiote jeunesse, ô pauvre jeunesse, ô sotte jeunesse
Ô jeunesse bleue, ô jeunesse jaune, ô jeunesse verte, ô jeunesse conne
Ô jeunesse blanche, ô jeunesse rouge, ô jeunesse noire, ô jeunesse qui bouge
Ô jeunesse percée et anti-mondialiste, ô jeunesse tatouée et progressiste
Passez de la pommade à vos exploiteurs, passez vos commandes, n’ayez pas peur
Achetez le swoosh, mettez-nous encore une couche, ô tendre jeunesse, merci de tout cœur

Des victimes consentantes vous êtes, des consommateurs, des pauvres bêtes
des pigeons plumés jusqu ‘à la peau par la libre entreprise en plein assaut
Par le swoosh qui vous pousse à vous cribler de dettes,
Par la marque qui vous embarque comme des mauviettes
Par un tas de torchons déguisés en survêts
Par les manigances de la puissance qui colonise vos têtes…

Ô tendre jeunesse, chose douce, chose fluide
Dites non à la vieillesse, écoutez vos appétits
Ô tendre jeunesse, chose molle, chose humide
Dites non à la sagesse car un bon look n ‘a pas de prix

Um outro tema do BAC

20 mai 2011

La mondialisation, un sujet tarte à la crème ?

Je me remercie moi même de me poser cette excellente question ! Les sujets classiques ne sont pas en effet les plus faciles à traiter, bien au contraire. Mettez-vous dans la peau du correcteur fatigué qui lira jusqu’à la nausée des introductions de dissertation trop souvent identiques, des conclusions en forme d’ouverture trop attendues. Sur un sujet sans surprise, les copies sont également sans surprise et c’est bien là le problème…
Il est donc encore temps de vous exercer à réveiller l’attention de votre correcteur par la qualité de votre copie, par votre capacité à rendre attractif un développement convenu. Si vous réussissez, c’est bingo, vous êtes l’oasis espérée d’une longue traversée du désert.
Exerçons nous donc avec un sujet sur le thème de la mondialisation.
Premier conseil : soyez encore plus précis qu’à l’habitude quand vous définirez la notion (sans doute dans une introduction). Soyez encore plus rigoureux qu’à l’habitude. Exemple issu d’une définition qui souligne la complexité de la notion “La mondialisation entraîne des dynamiques contradictoires autour du couple uniformisation/fragmentation : unification du monde dans un marché mondial, mais aussi régionalisation des échanges et « oubliés » de la mondialisation ; gouvernance mondiale mais décentralisation, poussée identitaire ; société mondiale en gestation face à l’exclusion, l’isolement ou l’encouragement de la diversité culturelle.” Lisez l’ensemble de la définition ici sur le blog d’un prof d’histoire géo et rendez vous compte que l’on peut être précis sur une notion par ailleurs classique.
Deuxième conseil : sortez des sentiers battus. Si vous abordez la notion dans une épreuve SES, n’oubliez pas qu’il s’agit autant d’économie que de sociologie. Peut-être pourrez vous aborder la notion au travers des critiques de la société de consommation si le sujet vous y invite. Pensez alors à faire des références culturelles et pourquoi pas à des chansons. Lisez ici l’excellent billet d’une professeur en art plastique sur les chansons critiques de la société de consommation … Vos profs apprécieront votre capacité à solliciter à bon escient des éléments de culture générale, même contemporaine.
Troisième conseil : jouez un peu avec la notion, pensez aux concepts proches ou à ceux qui s’y opposent. Ceux d’entre vous qui tentent sciences po ont ainsi travaillé sur la notion de frontière qui peut sans aucun doute être ici réinvestie (voir le sujet “la mondialisation signifie t-elle la fin des frontières “).

Preparação para Exame do 12º ano em França – O problema do Desenvolvimento Sustentável

 
Sur le blog éco(lo) d’Audrey Garric, on trouve un excellent article sur le barrage des Trois-Gorges pour illustrer toute la complexité du développement durable. Ce barrage présenté comme un soutien indispensable à la croissance économique chinoise est à l’origine de difficultés environnementales, sociales et même économiques (lire l’article en intégralité).

24 mai 2011

Croissance et développement durable, un épineux sujet au bac

Faut-il en conclure que la recherche de la croissance économique et celle d’un développement durable sont incompatibles ? C’est une question pas si anodine sachant qu’elle pourrait vous être posée au bac en Sciences Économiques et Sociales (SES).
Voici une proposition de plan rédigée par Diane Duval, professeur de SES, sur le magazine de l’EDD du WebPédago. L’article détaille les différents éléments de ce plan et donne des pistes pour aller plus loin. Lire l’article en intégralité.

I. Croissance économique et développement durable semblent inconciliables
A. La croissance économique compromet le développement durable
B. Le développement durable freine la croissance économique
II. Croissance économique et développement durable peuvent aller de pair
A. La croissance économique rend possible le développement durable
B. Le développement durable stimule la croissance économique

Je ne vous apprendrai rien en disant qu’on attend de vous une réponse argumentée plutôt qu’une simple prise de position. Dans ce type de sujet où deux termes s’opposent, une posture classique revient à analyser les impacts de l’un sur l’autre. Dans un premier temps, il est plus simple d’aller dans le sens du sujet (croissance et développement durable sont incompatibles) puis de montrer qu’ils se nourrissent l’un l’autre. Cela ne sert à rien d’essayer de faire plus original : ce type de plan vous permet de présenter vos idées de manière cohérente.
Vous pourrez en conclusion rappeler la complexité du sujet (comme le montre l’exemple du barrage des Trois-Gorges) puis prendre position à la lumière des différents arguments exposés précédemment. Ne cherchez pas à trouver une solution (vous venez de démontrer qu’il n’y avait pas une seule solution), mais vous pouvez par exemple imaginer, selon vous, quel axe de développement sera privilégié dans les prochaines années.